Amour infini, de Gabriel de Monjauze.

Amour infini.

Recueil : Stances anacréontiques (1785)
Mon printemps est passé, c'en est fait, ô Delphire !
Hélas ! pour jamais il fuit loin de moi.
Mais mon coeur, qui pour toi, pour toi seule soupire,
Du temps se moque et n'a pas suivi la loi.

Mon front n'est plus paré des fleurs de la jeunesse ;
Déjà blanchissent mes blonds cheveux ;
Peu m'importent les ans, quand d'une amoureuse ivresse,
J'éprouve de toi encore tous les feux.

Tant que Vénus excite en nos deux âmes attendries
Des sentiments voluptueux,
On peut braver ensemble du temps la puissance ennemie ;
L'homme reste jeune, s'il est amoureux.

La nature au printemps se montre éblouissante ;
Elle prend ses plus beaux atours ;
Mais dans l'hiver encore, féconde et bienfaisante,
Elle a des fleurs et des beaux jours.

Mon coeur est toujours empressé de te plaire ;
Tes moindres voeux sont sa loi.
Trop heureux de pouvoir, sur cette belle terre,
Vivre et mourir auprès de toi.


Gabriel de Monjauze.