La faute, de Robert Godet.

La faute.

Recueil : Poésies (1915)
Des matins frais et doux ont affolé mon cœur,
Et j'ai senti ma vie en moi se troubler toute ;
Mais j'ai, d'un grand effort, continué ma route
Et donne vers mon Rêve un coup d'aile vainqueur.

Mon regard a pâli sous la clarté trop vive
Et les soleils trop durs des lourds midis brûlants ;
Mais j'ai su me traîner seul, las, blême, à pas lents
Pour gagner l'ombre fraîche, et boire et que je vive.

Les nuits m'ont dit des mots qui m'ont ensorcelé
Et j'ai mêlé nos pleurs d'extase à leur rosée ;
Mais j'ai rompu le charme et mon âme grisée
A secoué pourtant leur mensonge étoilé.

J'aurais vécu, j'aurais été fort et sans blâme,
Si je n'avais couché mon Rêve à vos genoux
Et contemplé, — mourant de bonheur — avec vous
Les roses éplorés des soirs qui blessent l'âme.

Robert Godet.