L'espoir nous console et sourit, de Jean-Louis Gonzalle.

L'espoir nous console et sourit.

Recueil : Les poèmes lyriques et poésies diverses (1860)
À mon jeune fils.

Quand de nos jours heureux l'horizon s'assombrit,
L'Espoir est près de nous qui console et sourit ;
C'est l'ange protecteur qu'en naissant Dieu nous donne,
Et lorsqu'au désespoir notre cœur s'abandonne,
Cet ange, ami fidèle, en pleurant nos excès,
Nous parle encor d'amour et de lointains succès.
Avec lui l'honnête homme ose braver l'envie.

Tu ne sais pas encor ce que c'est que la vie ;
Sur ton humble berceau, frêle et timide fleur,
En vain gronde et mugit l'ouragan du malheur ;
Tu ne sais même pas qu'aux doux baisers d'un père
Se mêlent sur ton front les larmes d'une mère,
Ni jusqu’où vont pour toi nos vœux et notre amour,
Nos craintes, nos plaisirs, nos soins de chaque jour,
Tant nous aimons tous deux, en notre amour extrême,
À t'aimer comme on dit que le bon Dieu nous aime :

Quelle que soit du sort l'inexorable loi,
On peut encor trouver plus malheureux que soi.
Dieu le veut ... et, soumis à cette loi suprême,
Ne cherchons pas en vain le mot de ce problème.
Non ! si contre le bien le mal a prévalu,
Il aurait pu mieux faire ... il ne l'a pas voulu !

Mais, auprès de l'écueil où notre esquif se brise,
Sur un monceau de fleurs l'Espérance est assise,
Et quand des mauvais jours les orageuses mers
S'ouvrent pour engloutir nos rêves les plus chers,
Elle nous tend la main, nous arrache à l'abime ;
Sous ses baisers d'amour notre cœur se ranime,
On devient plus prudent et l'on sent qu'il nous faut
Acheter le bonheur pour savoir ce qu'il vaut :
Cueilli sans être mûr, ce fruit n'a point de charmes,
Il faut pour le mûrir l'arroser de nos larmes !

Jean-Louis Gonzalle (1815-1879)