La vie au dur combat, de Charles de Pomairols.

La vie au dur combat.

Recueil : Les rêves et sentiments (1880)
L'homme sur terre est nécessaire à l'homme.
Des innombrables maux que la plainte dénomme
La solitude encore est le pire ici-bas.
L'âme peut l'endurer, le corps ne le peut pas.

Si la vie en commun au dur combat nous livre,
Il est pour l'homme seul impossible de vivre.
Il faudrait qu'il créât un monde tout entier,
Qu'il apprît tous les arts, qu'il sût chaque métier.

Oh ! le cruel labeur et l'existence étrange !
Nous en sommes exempts : l'harmonieux échange
Fait courir entre nous de mutuels bienfaits
Qui vont, viennent, tantôt causes, tantôt effets,

Avec le rythme heureux du chant et de la strophe.
Le bûcheron lointain nous loge et nous réchauffe,
Le paysan nourrit notre corps chaque jour,
Et l'artisan, par lui repu, l'aide à son tour,

Le juge par le droit abrite la chaumière,
Sur nos pas le savant projette une lumière,
L'homme d'État nous guide à son but triomphant,
Et sur son dur chemin le soldat nous défend.


Charles de Pomairols (1843-1916)