Le passé ne peut revenir, d'Hippolyte Fleury.

Le passé ne peut revenir.

Recueil : Les nouvelles feuilles des bois (1873)
Il est tard, la nuit sombre a déployé ses voiles,
J'entends dans le lointain un sourd bourdonnement :
Aux cieux scintillent les étoiles,
Je me sens dans les flots d'un vague isolement !

Non ! je ne suis pas seul ; je suis avec mon âme,
J'interroge un passé qui ne peut revenir ;
Autour de moi je sens la flamme
D'une nouvelle vie et d'un autre avenir !

Oh ! ne maudissons pas notre courte existence
Et jouissons des biens que Dieu nous a donnés ;
Un souffle est la seule distance
De son temple éternel, de ses champs fortunés !

Cette terre conduit aux célestes rivages
Où viennent aborder les justes d'ici-bas :
Là-haut sont nos derniers naufrages,
Nos dernières douleurs et nos derniers combats.

Laisse-moi voir encor tes fleurs, belle nature,
Ton beau soleil, tes champs, tes vallons, tes ruisseaux,
Et, comme une douce pâture,
Porte-moi les parfums qu'exhalent tes coteaux,

Porte aussi mes soupirs à celle que j'adore,
Ange de cette terre envolé dans les cieux !
Avec les larmes de l'aurore
Emporte en même temps les larmes de mes yeux !

Hippolyte Fleury