Le saule pleureur, d'Hippolyte Fleury.

Le saule pleureur.

Recueil : Les nouvelles feuilles des bois (1873)
Saule, je viens sous ton ombrage
Mêler mes soupirs à tes pleurs,
Promène sur moi ton feuillage,
Confondons tous deux nos malheurs !

Adoucissons ainsi nos peines,
Puisqu'ici-bas il faut souffrir :
Nos coupes de larmes sont pleines,
Apprenons tous deux à mourir.

Auprès du ruisseau qui murmure,
S'exhalent tes accents plaintifs ;
Je les entends, et la nature
Ne peut garder les miens captifs.

Tu portes le deuil sur la terre
D'amis nombreux qui ne sont plus,
Et dans mon urne funéraire
Tombent mes regrets superflus !

Près des fleuves de Babylone
Tes rameaux abritaient des pleurs ;
Dans les champs foulés de Bellone
Tu bénis encor des douleurs.

Saule, à tes pieds mille naufrages
Ont fait flotter mille débris,
Tu vois passer tous les orages,
Tout dort sous tes rameaux chéris !

Sous ta flottante chevelure
L'amant exhale ses soupirs ;
L'oiseau confie à la nature
Et ses plaintes et ses désirs.

Quand pour moi s'ouvrira la tombe,
Couvre-moi de tes rameaux verts,
Et reçois avant que j'y tombe
Mes vœux, mes larmes et mes vers !

Hippolyte Fleury