Les souvenirs de la tendre jeunesse, d'Hippolyte Fleury.

Les souvenirs de la tendre jeunesse.

Recueil : Les nouvelles feuilles des bois (1873)
Pour traverser la vie armons-nous de courage,
Il ne fait pas toujours beau temps :
Le flot souvent monte avec rage,
Ses lames font passer de terribles instants !

Mais il faut résister aux coups de la tempête,
Comme de braves matelots,
Et laisser gronder sur sa tête
L'orage, les éclairs, la tourmente et les flots !

Nous sommes assaillis par les hommes eux-mêmes ;
C'est le sort de l'humanité
De recueillir des maux suprêmes
Dans les incultes champs de la fraternité !

Mais tôt ou tard le Dieu qui gouverne le monde
Nous fait sentir son bras puissant,
Et vient fermer la mer profonde
Où tombent à la fois le fourbe et l'innocent.

L'homme forge des fers et nous couvre d'épines,
Dieu fait pour nous croître ses fleurs,
L'homme se plait sur les ruines,
Dieu, d'un souffle, tarit la source de nos pleurs !

Dans la tranquille mer de la douce espérance
Voguons paisibles matelots,
Et sur le cap de la souffrance
Ne laissons pas sombrer nos fragiles canots.

Hippolyte Fleury