Vivre sa vie, de Élisa Mercœur (1829).

Vivre sa vie sans nul regret.

Recueil : Poésies et romances (1829)
Ne jamais redouter le temps qui nous entraîne,
Attendre sans effroi son rappel vers les cieux,
Chaque jour détacher un anneau de sa chaîne,
Mourir sans exhaler des regrets pour adieux ;

Supporter sans chagrin l'oubli de la richesse,
Deviner au regard ce qu'éprouve le coeur ;
Sans cesse prodiguer la plainte à la tristesse,
Et présenter joyeux un sourire au bonheur ;

À l'indigent ami, tendre la main d'un frère,
Alléger ses malheurs en lui parlant des cieux,
Et, fidèle, toujours soulageant sa misère,
De consolants pavots couvrir ses tristes yeux.

Aimer pour enchanter les peines de sa vie,
Muet à tout soupçon loin de soi l'exiler,
Retrouver dans ses fils sa jeunesse flétrie,
Et comme un doux parfum, sur le soir s'exhaler.

Ainsi l'heure toujours en succédant à l'heure,
Lui devrait révéler quelques nouveaux bienfaits ;
Jusqu'au jour, où s'ouvrant la céleste demeure,
L'âme au sein de son Dieu se repose à jamais.


Élisa Mercœur.