Ô mort, emporte-moi, d'Edmond Arnould.

Ô mort, emporte-moi dans ton éternité !

Recueil : Les sonnets et poèmes (1863)
Ô mort, si cette horreur que ton nom seul inspire
Ne m'a jamais troublé, même à la fleur des ans ;
Si tu n'as jamais vu ni mon cœur ni mes sens
Frémir aux bords sacrés de ton muet empire ;

Si j'ai toujours aimé ton pâle et froid sourire,
Si tes regards toujours m'ont semblé caressants,
Choisis, du moins, propice à mes vœux innocents,
L'heure qui m'ouvrira le doux monde où j'aspire !

Avant qu'en moi l'esprit ait perdu tout pouvoir ;
Avant que dans mon sein l'énergique vouloir
Ait misérablement fléchi, vaincu par l'âge ;

Avant que l'idéal par le réel dompté
Ne soit plus à mes yeux qu'un sombre et vain nuage,
Ô mort, emporte-moi dans ton éternité !

Edmond Arnould (1811-1861)